jeudi 11 octobre 2007

Fetish, David Lynch & Christian Louboutin



Dans la jolie galerie Vero Dodat, passage couvert du 2e arrondissement, se trouve la Galerie du Passage, qui accueille dans son cadre feutré l'exposition Fetish jusqu'au 3 novembre.

L'ambiance est feutrée. Les meubles anciens de la galerie se mêlent aux photos de David Lynch; photos des chaussures cruelles de Christian Louboutin, elles même exposées. Cruelles car improbables, importables... elles tranchent de netteté avec les corps flous de celles qui les portent et créent le désir, le fantasme...

Personne n'en parle mieux que Louboutin lui même :

« David Lynch m'avait demandé de dessiner des souliers pour son exposition à la Fondation Cartier. Il peignit certains d'entre eux pour les montrer dans une cage. A mon tour, j'ai voulu lui demander d'en photographier d'autres, que j'aurai conçus dans ce but. David Lynch est l'un des plus grands réalisateurs vivants. Comme ses films sont extrêmement codés, j'ai voulu des souliers fétichistes, dont le fantasme obéit lui aussi à des codes.Beaucoup ne voient le soulier qu'en accessoire de la marche. Pourtant, il est des souliers pour courir, d'autres pour nager… Et aussi des souliers destinés au sexe. S'il est un élément de fétichisme dans la garde-robe, c'est le soulier féminin, même sans talons. Il a l'allure d'un totem. C'est un objet de culte qui appelle le rituel. J'avais prévu des souliers-sculptures, moins faits pour être portés que pour exalter ce qu'il y a de plus beau: la cambrure et le cou de pied.David Lynch m'a aussitôt donné son accord. Il voyait un sofa, de grandes roses, une lampe et une fille. Il voyait ce que je ne voyais pas. Il avait déjà l'image en tête.Les photos ont été prises en deux jours à Paris. A ma surprise, David a travaillé comme un chorégraphe. Toujours en mouvement rapide, il prenait une vue générale, puis un plan plus rapproché qu'il resserrait jusqu'à des détails. Il avait l'enthousiasme d'un étudiant des Beaux-Arts, et la puissance religieuse d'un Pollock ou d'un Picasso. Ses images sont douées d'une dimension picturale: elles m'évoquent Bellmer et Bacon, mais aussi Boldini, dans le rendu des chairs. Les bougés et les surimpressions sont courants dans ses films, mais il y a là des cambrures qui semblent exploser en flammes. A aucun moment, pourtant, les souliers n'ont quitté le centre de son attention.David avait une exigence : « No bones ». Les modèles s'appellent Nouka et Baby, et dansent au Crazy Horse. En fétichiste d'opérette, je les ai choisies pour leur grâce et leur beauté, mais aussi pour leur cambrure. Elles ont porté avec naturel ces souliers importables. Leurs peaux très blanches, leurs yeux très foncés et leurs bouches brillantes s'intégraient à l'esthétique de Lynch, qui, tous comptes faits, a parfois des accents fétichistes: le corps lacéré d'Isabella Rosselini dans Blue Velvet, ou cette atmosphère d'angoisse où le sang n'est jamais versé. Ou encore ces rideaux à plis droits qui semblent au garde-à-vous, et que j'ai retrouvés pour la prise de vues. Le sofa s'est changé en chaise de bordel viennois, signée Adolf Loos, écrasant un tapis aux couleurs de plante carnivore. David Lynch en a fait, comme à son habitude, un décor peuplé d'ombres ».


Sauf les images elle même peut-être : petit aperçu de ce que vous pouvez y voir :









C'est où ?
Galerie du Passage
20-26 Galerie Vero-Dodat
75001 Paris
C'est quand ?
jusqu'au 3 novembre 2007
du mardi au samedi
11h00-19h00
Plus d'informations sur le site de l'exposition : ici
et sur le site de la galerie : .

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